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6 mars 2024 3 06 /03 /mars /2024 11:46

L’usine Alstom à Ornans (Doubs), environ 300 p., a fêté son centenaire en 2019 – en fait elle existe depuis 1900, sous la forme d’un atelier de mécanique créé par Charles Olivier (il y fabrique les compresseurs d’air de la ligne de métro parisien Nord-Sud, actuelle L12).

Une rare vidéo Est Républicain de 2019 retrace l’historique de l’usine, par un de ses employés (veuillez excuser la pub., mais la vidéo mérite d'être mentionnée) :

Vidéo intéressante (après la pub...), notamment la partie historique au début.

Dès 1919, c’est le début du moteur de traction ferroviaire à Ornans. La société zurichoise Maschinen Fabrik Œrlikon reprend l’atelier Olivier pour construire les moteurs de la Compagnie de chemins de fer Paris-Orléans (une des compagnies privées d’avant la nationalisation de 1937 ; c’est le réseau Austerlitz Bordeaux-Toulouse, et jusque dans les années 1960, on parlait de la gare d’Orléans-Austerlitz).

Compagnie P.-O. (Paris-Orléans), gare d'Orsay - aujourd’hui musée d’Orsay (photo AM)

La société suisse construit à Ornans des cités-jardins, toujours habitées. En 1972, la société est rachetée par la CEM (Compagnie électro-mécanique), filiale française d’une autre société suisse, Asea Brown Boveri ABB, géant de l’électrotechnique.

Les fabrications d’Ornans furent variées : les premiers électro-aimants, fournis au Collège de France pour la physique nucléaire (1929), moteur du premier métro-automatique VAL (Villeneuve d’Ascq-Lille, aujourd’hui connu via Orlyval) (années 1970), moteurs du TGV, puis moteurs à aimants (2008).

En 1984, la CEM (présidée de 1971 à 1983 par Roland Koch, X1937) est rachetée par GEC-Alsthom, aujourd’hui Alstom, et avec ses 300 p. est toujours la spécialiste mondiale des moteurs de traction ferroviaire. C’est une des 16 usines françaises de ce groupe.

Elle récemment refait parler d’elle pour l’inauguration en janvier 2024 d’un banc d’essai pour moteurs de haute puissance – avec 300 p. elle fabrique 2000 moteurs de traction ferroviaire par an), pour 1,4 M€, dont 0,4 M€ financés par le plan France Relance 2030 (et avec une communication de type technologies industrielles 4.0…)

Au-delà de cet investissement (somme toute modeste – et pourquoi co-financé par l’État ?), c’est le parcours historique et la compétence technique de cette usine que nous avons voulu illustrer ici.

Vue panoramique de moteurs, usine d'Ornans, photo Est Républicain 2017.

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5 février 2024 1 05 /02 /février /2024 22:59

L’usine sidérurgique d’Hayange (Moselle) est une usine-mère de la production de rails en France. Créée par les Wendel en 1892, elle reste plus ou moins dans ce mégalithe familial, à travers diverses maisons-mères, comme Wendel-Sidélor puis Sacilor (Sociétés des aciéries de Lorraine) ; la fusion a lieu en 1984 avec Usinor (Union sidérurgique du Nord de la France), sous l’égide du gouvernement socialiste, en Usinor-Sacilor (devenue Usinor tout court en 1997). Elle porte le nom de SOGERAIL, au sein d’Unimétal, filiale produits longs d’Usinor-Sacilor.

L’aventure française s’arrête là. En 1999, SOGERAIL est vendue par le groupe français à British Steel. Ce groupe devient Corus (par fusion de British Steel et de la sidérurgie nationale NL Hoogovens) en 1999. L’usine d’Hayange fait à peu près 440 p., dans un méga-groupe de 66 000 p.

Corus Hayange (57), photo jmo (lien)

 

Cette entreprise CORUS, conglomérat anglo-néerlandais dans l’aluminium et l’acier, s’est avérée être une catastrophe. De la même manière que la sidérurgie française USINOR s’était vendue à l’Indien Mittal Steel en 2003, la sidérurgie britannique (British Steel devenue CORUS) doit se vendre à l’Indien Tata Steel en 2007. En octobre 2009, le vibrionnant Sarkozy annonce un contrat de 300 millions d’euros pour l’usine d’Hayange avec RFF (Réseau ferré de France).

A partir de 2016, après les groupes britannique puis indien, interviennent les financiers : Tata vend ses produits longs européens (dont Hayange) à Greybull Capital, fonds britannique créé… en 2010.

L’usine d’Hayange, 2015 (Les Échos, lien) ; image des rails, France TV.

 

En juillet 2020, nouveau fonds financier et commercial britannique, Liberty Steel, propriété du magnat anglo-indien Sanjeev Gupta, qui est préféré par l’État français à d’autres repreneurs. Huit mois plus tard, lâché par la faillite de son principal banquier, Liberty doit mettre Hayange au tribunal de commerce en mars 2021. L’usine est rachetée par Saarstahl (un groupe sidérurgique resté européen… allemand, en Sarre, et qui a fait partie avec Arbed de l’éphémère Arcelor, suite d’Usinor, avant rachat de la partie française par Mittal Steel).

 

Bilan :

1) Wendel, puis SIDELOR, SACILOR (privé puis public français) : 1892-1986.

2) USINOR-SACILOR puis USINOR (public puis privé français, après  privatisation) : 1986-1999.

3) British Steel puis Corus sidérurgiste britannique : 1999-2007.

4) Tata Steel (sidérurgiste indien), toujours sous le nom de Corus : 2007-2016

5) Greybull Capital (fonds financier anglais) : 2016 – juillet 2020.

6) Juillet 2020 – juin 2021 Liberty Steel (groupe financier et de négoce sidérurgique anglo-indien)

7) Depuis juin 2021 ; Saarstahl (groupe sidérurgique sarrois, All.) ; toujours avec environ 450 p.

En haut, signalisation actuelle Saarstahl. En bas : Liberty Steel, propriétaire pendant 8 mois, a eu le temps de changer les panneaux indicateurs.

(toutes les signalisations de l'usine sont à retrouver sur cette excellente page)

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29 juin 2019 6 29 /06 /juin /2019 06:57

Projet GÉO-INDUS : par une approche géographique, faire vivre sur Internet le paysage actuel de l’industrie française

 

 

Travaillant de longue date (2003) sur la diffusion numérique des savoirs sur Internet, il nous est apparu une carence dans les contenus du Web sur un sujet précis : la connaissance des sites industriels de nos territoires français. Cette lacune n’est pas seulement virtuelle, elle ne fait que refléter un manque de prise en considération du sujet dans la vie réelle – une sorte de trou noir patrimonial et cognitif. Quels sont nos sites industriels français (et nous insistons sur la notion géographique de site) ? Pour un site donné, quels ont été ses noms successifs, à quelles entreprises et/ou groupes a-t-il appartenu et appartient-il actuellement ? Quelles sont ses caractéristiques : nombres de personnes, type de fabrications ? Autant de questions auxquelles il peut être difficile d’avoir réponse.

Les causes de cet état de fait sont diverses, et corrélées. La désindustrialisation est passée par là, et avec elle un moindre intérêt pour l’industrie. Certaines usines sont devenues friches (certaines reconverties), ou musées – parfois sans rapport immédiat avec leur activité passée. Côté université, l’histoire industrielle n’est pas une matière en pointe – et encore moins la géographie industrielle : des historiens ou acteurs locaux (qu’il faudra mobiliser) ont maintenu une certaine connaissance – sans forcément la diffuser sur internet. Les entreprises elles-mêmes ont bien plus souvent sur leur site internet une vision corporate, et leurs sites industriels sont parfois difficiles à trouver sur leur site… internet ; ajoutons le fait que les rachats successifs ne facilitent pas la traçabilité et la transmission historiques de la connaissance – d’ailleurs les entreprises, si elles s’intéressent peu à leurs sites, s’intéressent encore moins à leur histoire, ou l’écrivent à leur manière (faire état des réductions successives d’activité et d’emploi sur un site donné n’est certainement pas gratifiant).

Ce constat posé, que faire ? Une action énergique portant sur la constitution d’une base des sites industriels des territoires, et sur la diffusion numérique (i.e. sur internet) de cette connaissance, est nécessaire. Par souci du savoir. Par souci d’image de l’industrie auprès de nos concitoyens – les récentes manifestations depuis novembre 2018, réclamant notamment une meilleure prise en compte du fait territorial, ainsi que de l’emploi industriel local, ne sont pas sans lien avec ce sujet, loin s’en faut. C’est aussi un moyen pour nos concitoyens de s’approprier leur tissu industriel que diffuser la connaissance et la description de ce tissu.

Quels acteurs sont susceptibles d’être mobilisés dans cette perspective d’intérêt général ? On pourrait penser à des administrations (ex. Direction générale des entreprises, Bercy) – mais sans doute ont-elles d’autres préoccupations. Des partenaires d’entreprise comme La Fabrique de l’Industrie ont, eux, été contactés. Il est important de considérer dès le départ une certaine efficacité à notre action : la meilleure diffusion de la connaissance possible n’est pas sur un portail, fût-il en .gouv.fr, mais sur un des sites les plus regardés au monde, et le premier de loin pour la recherche documentaire : Wikipédia. Par essence-même, une connaissance inscrite sur Wikipédia a vocation à connaître une plus large audience que par tout autre moyen de diffusion ; ceci n’exclut pas que, parallèlement, la même connaissance, une fois constituée, soit diffusée sur un site public – d’une administration, d’un think tank (La Fabrique de l’Industrie), d’une Région, d’un Département.

Le modus operandi suivant peut être proposé :

  • >> Coopération avec l’association Wikimédia France (déjà contactée) – notamment pour un « week-end contributif » comme il existe dans d’autres domaines (culture,…)
  • >> Partenariat éventuel entre Wikimédia et des Régions ou Départements, par le biais d’un « wikipédien en résidence » (modalités de financement à trouver) : un contributeur Wikipédia confirmé est placé à mi-temps ou à temps plein auprès d’une collectivité, pour travailler sur le sujet des sites industriels du territoire concerné, et nourrir les pages Wikipédia correspondantes. Ce type de « résidence » fonctionne correctement avec des institutions culturelles 
  • >> Le sujet devra être circonscrit : c’est en priorité l’industrie encore vivante qu’il s’agit de documenter – le projet est un projet de patrimoine vivant.
  • >> Des exemples de sites géographiques en nombre très limité sont donnés en annexe (PDF), et par commune.

 

Un comité de projet pourra être constitué, réunissant diverses entités intéressées (contactées à ce jour : Wikimédia France, La Fabrique de l’Industrie). Il aura en charge la définition et le suivi des étapes ; la définition d’une méthode (autant que faire se peut : harmonisation de la constitution de cette connaissance et de son inscription sur Wikipédia) ; la participation éditoriale à d’autres sites publics sur le sujet ; la recherche de financements. Des déclinaisons locales d’un tel comité pourront avoir lieu en province, en fonction des collectivités intéressées.

 

(télécharger sur ce blog le PDF reprenant ce texte, avec quelques exemples en nombre limité en annexe) (#GEOINDUS sur Twitter)

 

(page Wikipédia du projet, #GEOINDUS)

 

 

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Présentation

  • : Humanités numériques, édition scientifique, diffusion numérique de la connaissance, Enseignement supérieur et recherche, géographie et histoire industrielles (auteur Alexandre Moatti) = ISSN 2554-1137
  • : Discussions sur le projet de Bibliothèque numérique européenne, sur les bibliothèques numériques en général; sur l'édition scientifique papier & en ligne.
  • Contact

Avant-propos

Ce blog est créé à la rentrée scolaire 2006 pour suivre les sujets suivants:
# Bibliothèque numérique européenne (BNUE), et bibliothèques numériques en général.
# Edition et revues scientifiques.
Il est étendu en 2023 sur des sujets connexes aux précédents, mais néanmoins liés : patrimoine industriel, géographie industrielle.

 
Alexandre Moatti
 
 

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